Tous les pays d’Europe qui octroyaient de généreuses subventions aux installations solaires (Italie, France, Allemagne, Espagne, République tchèque) ont décidé ces derniers mois des coupes plus ou moins draconiennes, surtout pour les grandes centrales au sol, dont les aides ont été les plus réduites mais aussi les autorisations limitées, mais en épargnant les petits toits résidentiels. Ci-dessous, un récapitulatif de ces baisses.
Plusieurs conséquences :
- Une chasse aux grandes centrales européennes en construction ou déjà opérationnelles, qui bénéficieront pour 20 ou 25 ans des anciens tarifs. Elles ont fait l’objet de rachats records.
- Un très probable net ralentissement des installations solaires en 2011 en Europe, après une année 2010 qui sera spectaculaire, tirée justement par l’envolée des installations.
- La déprime de la filière solaire en France, avec maintenant la menace d’annulation de l’usine de cellules à couches minces prévue par le groupe américain First Solar en Gironde.
A l’inverse, les Etats-Unis vont installer une série d’immenses centrales solaires au sol dans les déserts de Californie et de l’Arizona, qui viennent d’être autorisées, poussées non pas par des tarifs officiels d’achat mais par des contrats d’achat à long terme avec les compagnies californiennes d’électricité, qui ont l’obligation d’atteindre 33% d’énergies renouvelables. Ce qui revient un peu au même, bien que le prix payé pour le kilowatt-heure soit inférieur aux alléchants tarifs garantis européens.
Boom des installations solaires prévu en 2010
Les cabinets IMS Research ou encore iSuppli prévoient un quasi-doublement des installations mondiales de panneaux cette année, autour de 15 GW, contre 7 GW installés en 2009. Un boom tiré par les 8 GW de panneaux photovoltaïques qui seront posés en Allemagne en 2010, record absolu, selon les prévisions de la Fédération de l’industrie solaire, la BSW. Mais 2011 marquera un net ralentissement.
La vague de baisse des aides par pays
- L’Italie a réduit ses aides : à partir de mi-2011, les aides baisseront de 18 à 20% en 2011, puis encore de 6% en 2012 et de 6% en 2013, mais avec un plafond d’installations aidées relevé à 2 GW par an. Cette année, les installations éligibles à ces tarifs seront plafonnées à 1 GW contre 1,2 GW l’an dernier. La baisse sera plus forte pour les grandes centrales au sol que pour les toits solaires des particuliers. Mais l’Italie reste favorable au solaire : elle annonce un objectif d’atteindre 8 GW en 2020 contre 1,35 GW actuellement. Le pays, où vient de démarrer la plus grande centrale photovoltaïque d’Europe, et qui est devenu le 2ème marché mondial du solaire, avec une multiplication des méga-centrales au sol, a par ailleurs décidé de limiter considérablement les centrales sur les terrains agricoles.
- Espagne : Effondrement des aides solaires avec -45% pour les centrales au sol. Madrid a finalement décidé une réduction radicale de 45% de ses aides aux centrales photovoltaïques au sol. Les toits des particuliers seront préservés, puisque la baisse des aides (c’est-à-dire le tarif aidé de rachat de l’électricité solaire) se limitera à 5% pour eux, et pour les grands toits solaires la réduction ne sera que de 25%.
- France : Baisse de 12% des tarifs solaires, sauf pour les particuliers. La France avait déjà baissé ses tarifs en janvier 2010. Les installations françaises : de 81 mégawatts fin 2008, elle atteindront 850 MW fin 2010 et les projets déposés représentent plus de 3.000 MW, alors que le Grenelle de l’Environnement en prévoit 1.100 MW fin 2012. Paris a en outre décidé de suspendre pendant trois mois les tarifs aidés de rachat de l’électricité solaires pour les nouvelles installations, sauf pour les petits toits résidentiels. La France a aussi renoncé à ses projets de centrales au sol en série : l’appel d’offres d’une centrale solaire par région est tombé à l’eau. Ce projet avait pourtant été présenté en grande pompe par l’ancien ministre de l’Ecologie et de l’Energie, Jean-Louis Borloo en novembre 2009.
- Mais ce qui inquiète le plus le secteur est que la France pourrait décider d’appliquer un quota limitant les installations aidées, peut-être de 300 à 500 MW par an, comme le préconise le rapport Charpin. Les négociations avec la filière s’ouvrent le 20 décembre.
- Du coup First Solar, menace d’annuler son projet d’usine solaire en France, qui était prévue en partenariat avec EDF EN en Gironde pour un démarrage en 2012 : « le » grand projet solaire de l’Hexagone applaudi par le gouvernement, risque de partir en fumée pour cause de valse des décisions sur le solaire et du récent gel des aides.
- Allemagne : Les aides allemandes au solaire ont été réduites de 16% cet été, après une baisse déjà de 9% en janvier, une baisse finalement moins forte que celle envisagée initialement. Pour l’instant, elles sont de 39,12 centimes par kilowatt-heure. Et l’Allemagne envisage de les baisser encore davantage et même de plafonner le nombre de mégawatts pouvant en bénéficier, qui pourrait être de 3 GW.
- La République tchèque a – elle aussi – stoppé net dans le solaire : la République tchèque, autre eldorado des installateurs mondiaux depuis un an, attirés par son tarif de rachat subventionné particulièrement généreux, va le réduire de moitié pour toutes les installations autres que les petits toits résidentiels. Le Parlement tchèque vient en effet de voter une baisse de 50% du tarif aidé pour les installations de plus de 30 kW (un toit de maison est d’environ 20 kW) qui seront raccordées au réseau en 2011. Dans ce pays qui disposera bientôt de 1,2 GW installés, contre seulement 50 MW il y a deux ans, c’est une volte-face qui va certainement interrompre la progression du secteur.
- A l’inverse, on assiste à un grand retour des grandes centrales photovoltaïques au sol aux Etats-Unis : Si toute une série de méga-centrales solaires californiennes viennent enfin d’obtenir le feu vert des autorités, après des années d’attente, cela fait plusieurs mois qu’aucun méga-projet solaire n’avait plus été annoncé en Californie, sans doute à cause de l’arrivée à échéance fin 2010 des aides du gouvernement Obama. Mais une nouvelle centrale arrive, projetée par l’une des compagnies d’énergie américaines les plus dynamiques dans les énergies nouvelles, alliée à l’un des plus gros fabricants : la compagnie d’énergie NRG Energy va confier à SunPower la construction d’une centrale photovoltaïque en Californie de 250 MW.
- Rachats en série de centrales européennes : La plus grande centrale solaire d’Europe, celle de Rovigo, en Italie (70 MW) a été rachetée par le fonds américain First Reserve pour près de 300 millions de dollars. Et SunPower a revendu sa super-centrale solaire italienne à Etrion pour près de 6 M €/MW. Il s’agit de la centrale de Montalto di Castro de 33 MW, l’une des plus grosses de la Péninsule.