Fonroche : sans changements, la filière solaire française est menacée de disparition

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Le marché solaire français, tout juste émergent, serait-il déjà menacé d’explosion en vol ? C’est en tout cas ce que redoute le groupe Fonroche, qui se présente comme le premier acteur industriel national avec une capacité de production de 90 MW à fin juin pour son site d’assemblage de panneaux photovoltaïques de Roquefort (Lot-et-Garonne). Fondée par Yann Maus en 2008, la jeune et ambitieuse entreprise, qui vient de lever 50 millions d’euros auprès du fonds Eurazeo et vise 200 millions d’euros de chiffre d’affaires pour 2010, monte au front avec une « Lettre ouverte » aux élus et décideurs économiques.

Première accusation, Fonroche estime que le développement des projets se fait de manière souvent anarchique, au détriment de l’environnement : « Les grands groupes installent parfois des centrales au sol sur des terres arables, au détriment de l’agriculture », regrette Thierry Carcel, le directeur général.

Trop de panneaux chinois !

Autre grief, sur le plan économique : « beaucoup de développeurs font appel à des fabricants de panneaux étrangers, notamment chinois, dont les coûts sont plus bas avant tout parce que la qualité est moindre et pas pour des raisons de main-d’oeuvre. Résultat : l’argent versé par l’Etat via les tarifs d’achat subventionnés crée des emplois, mais dans d’autres pays », poursuit le dirigeant. Une pierre dans le jardin d’EDF EN ou de GDF Suez, qui pour sa future centrale de 33 MW de Curbans (Alpes de Haute-Provence) utilisera des panneaux du chinois Yingli.

Le groupe estime que le développement d’une filière industrielle solaire française nécessite de remettre de l’ordre. « Pour freiner le marché, il faut commencer par interdire les centrales au sol sur des terres qui ne sont pas des friches industrielles ou des terrains non cultivables »,  juge Thierry Carcel.

La société souhaite également plus de responsabilité dans les appels d’offre pour tenir compte de l’origine des panneaux et privilégier les entreprises qui créent des emplois en France. « Nous en sommes un exemple : nous aurons 250 salariés en fin d’année et notre activité suscite aussi de nombreux emplois indirects. Il faut que les donneurs d’ordre publics intègrent ce critère pour pouvoir développer une filière française ».

Méfiance sur une nouvelle baisse des tarifs d’achat

Enfin, le groupe demande une visibilité sur les tarifs d’achat. Car malgré la baisse annoncée en début d’année, l’emballement du marché – qui a encore crû de 20% au premier trimestre 2010 – pourrait conduire le gouvernement à revoir encore les tarifs d’ici au 1er janvier 2012, selon Fonroche. « Nous avons investi 20 millions d’euros dans notre outil industriel, nous sommes prêts à aller plus loin mais nous avons besoin d’un cadre stable pour éviter des situations comme en Espagne où de nombreuses entreprises ont mis la clé sous la porte après la baisse brutale des subventions ».

Alors que le groupe ne fait pour l’instant qu’assembler des cellules achetées à l’étranger, notamment au Canada et en Scandinavie, il se dit prêt à s’engager dans la création d’une filière amont à condition d’obtenir plus de visibilité. En-dehors de Photowatt, aucune entreprise française n’est en effet présente à l’heure actuelle dans la fabrication de cellules photovoltaïques en silicium. Un groupement de PME – réunies au sein du consortium PV 20 emmené par la société MPO – cherche toutefois à se positionner sur ce marché amont très difficile.

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