- Guy Auger, Président, Greensolver
- Jean-Louis Bal, Président, SER
- Christine Delamarre, Directrice financement de projet, CA Leasing & Factoring
- Patricia Laurent, Co-fondatrice, GreenUnivers
- Pauline Le Bertre, Déléguée générale, FEE
- David Marchal, Directeur adjoint Productions et Energies durables, Ademe
- Laurence Martinez-Bellet, avocate associée, Watson Farley & Williams


Vingt femmes qui font avancer la transition énergétique : elles constituent le palmarès de la 2e édition du Prix des femmes des énergies renouvelables, initié par le gestionnaire de parcs éoliens et solaires Greensolver et GreenUnivers. Les résultats sont dévoilés lors du 20e colloque du Syndicat des énergies renouvelables.
Ces vingt femmes se répartissent en cinq catégories : entreprises, sphère institutionnelle, territoires, start-up et services (financement, juridique…). Avec pour chacune d’entre elles, une lauréate et des nominées. Le jury les a sélectionnées pour leur engagement quotidien, leur influence et la qualité de leurs réalisations dans l’année écoulée.
Gros plan sur ces responsables d’administrations, d’entreprises, d’ONG ou de territoires à l’oeuvre dans un secteur des énergies renouvelables où la parité reste encore loin, notamment dans les états-majors.
Virginie Schwarz – Les multiples facettes de l’intérêt général

Directrice de l’énergie à la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC)
Les mécanismes de soutien aux énergies renouvelables n’ont pas de secret pour elle. Et pour cause : de la mise en place du premier tarif d’achat pour l’éolien en 2000 quand elle démarrait sa carrière à la sous-direction de l’électricité au ministère de l’Industrie à la préparation de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) à la DGEC en 2018, Virginie Schwarz a contribué activement au développement du secteur.
À son poste de directrice de l’énergie depuis 2014 après plus de dix ans à l’Ademe, elle s’est fixé trois grandes règles. « D’abord apporter la visibilité indispensable à la filière grâce à la planification des appels d’offres. Ensuite, simplifier. Mieux vaut avoir des dispositifs robustes et qui fonctionnent plutôt que rechercher la perfection en ajoutant des aménagements qui risquent de susciter des perturbations », martèle cette ingénieure générale des Mines qui se définit par ailleurs comme perfectionniste. Troisième mot d’ordre, la crédibilité. « Les objectifs doivent être ambitieux mais atteignables et nous devons nous donner les moyens de les réaliser ».
Renforcer l’ancrage territorial
Le plus difficile à ce poste exposé ? Non pas résister aux lobbies qui « sont dans leur rôle », mais la gestion du temps. « Écouter toutes les parties prenantes pour ne pas passer à côté d’éléments essentiels est capital, mais on ne peut pas toujours aller aussi loin qu’on le voudrait. Et nous devons à la fois traiter les problèmes rapidement et garder toujours une vision de moyen/long terme ».
Si son année 2018 a été marquée par la préparation de la PPE, elle a aussi été frappée par la crise des « gilets jaunes » qui questionne son sens profond de l’intérêt général. « Est-ce que l’on va trop vite ? Les Français envoient des messages mitigés : ils soutiennent la transition énergétique mais nous interpellent sur la taxe carbone ». Ses solutions pour réconcilier les points de vue ? Renforcer l’implication des citoyens, via le financement participatif local notamment, et l’ancrage territorial de la transition.
« Virginie Schwarz s’est investie, dans le cadre de sa fonction de directrice de l’Energie, avec sa force de travail et sa grande compétence dans la mise en œuvre de la loi de Transition énergétique pour la croissance verte et dans la préparation de la Programmation pluriannuelle de l’énergie. »
Jean-Louis Bal, président du Syndicat des Énergies Renouvelables.
Dans les prochains mois, Virginie Schwarz va encore beaucoup travailler sur la PPE – qu’elle espère voir adoptée avant l’été – et sur de nombreux autres dossiers comme la construction d’une vision européenne de l’énergie avec ses homologues des autres pays. Mais elle se prépare aussi à endosser un nouveau rôle : mentor. « Le ministère de la Transition écologique et solidaire lance un réseau de mentorat pour aider les jeunes femmes à accéder à des postes de responsabilités. C’est important, car le combat de l’égalité professionnelle n’est pas encore gagné ». À la direction de l’énergie, qui regroupe 150 collaborateurs, elle aimerait ainsi parvenir à la parité pour les quatre postes de sous-directeur.
P. L.
Elisabeth Ayrault – Elle réveille la CNR

Présidente du directoire de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) © Photothèque CNR
Quand cette ancienne cadre dirigeante de Suez devient la première femme à prendre la présidence du directoire de CNR en 2013, le défi n’est pas mince. Concessionnaire du Rhône pour la production d’hydroélectricité, le transport fluvial et les usages agricoles, l’entreprise octogénaire vit dans un confort tranquille. Mais les changements rapides du marché de l’énergie et la question du renouvellement des concessions hydroélectriques menacent à terme son avenir.
À la fois producteur d’hydroélectricité et aménageur du territoire, avec un capital public/privé (Engie en détient 49,97%, la CDC 33,20% et les collectivités 16,83%) et un personnel peu rompu aux changements de cap, le groupe n’est pas simple à manœuvrer. Avec fermeté, Elisabeth Ayrault réorganise l’entreprise et entame une diversification pour chercher de nouvelles sources de revenus et prendre pied sur les marchés de demain : solaire, éolien, mais aussi agrégation…
Elle crée une direction de la transition énergétique et de l’innovation et lance un concours annuel pour mobiliser les 1 372 salariés sur les nouveaux enjeux. Pari réussi : en 2018, pas moins de 57 dossiers sont remontés, pour un objectif de 40. Et ces dernières années, CNR s’est lancé sur des secteurs émergents comme le solaire flottant, l’hydrogène, le stockage ou l’hydrolien fluvial. Un projet de photovoltaïque linéaire a ainsi été lauréat de l’appel d’offres pour les installations solaires innovantes. « Nous commençons tout juste à prendre la mesure des transformations qui attendent l’énergie solaire : nous serons très vite confrontés à un problème de foncier, il faudra utiliser des surfaces existantes comme les digues ou les routes », anticipe cette architecte et géographe de formation.
« Sur la bonne trajectoire »
Le changement commence à se traduire dans les chiffres : l’entreprise affiche une capacité installée de 3 103 MW en hydraulique (45 centrales), 573,5 MW en éolien (46 parcs) et 79 MWc en photovoltaïque (22 centrales). « La CNR est aujourd’hui positionnée sur la bonne trajectoire : nous avons sorti un pied du Rhône, qui reste bien sûr notre colonne vertébrale et notre principale source de revenus, pour préparer l’avenir avec une vision moderne du monde des énergies renouvelables », se félicite Elisabeth Ayrault, dont le mandat a été renouvelé en 2018.
“Elisabeth Ayrault a su gérer une entreprise complexe et la transformer en un acteur diversifié tout en satisfaisant ses actionnaires, une vraie performance !”
Guy Auger, président de Greensolver.
Les prochains défis de la présidente ? Innover encore et toujours, accélérer la diversification pour mieux équilibrer les recettes entre le Rhône et les nouvelles activités. Et préparer la bataille du renouvellement des concessions, qui devrait avoir lieu l’année prochaine.
P. L.
Hélène Gelas – Le sens du collectif

Associée chez LPA-CGR Avocats
Les effets de manche et les fortes phrases à la cantonade ne sont pas son genre. Hélène Gelas, avocate associée du cabinet LPA-CGR, n’en est pas moins l’une des juristes les plus écoutées, et consultées, de la place. Pas seulement par les entreprises des énergies renouvelables, sur leurs projets d’infrastructures ou de fusion-acquisition. Aussi par les organismes qui les représentent collectivement. En témoigne son implication dans les groupes de travail (GT) qui, en 2018 et sous égide ministérielle, ont voulu « accélérer » la croissance de l’éolien et du solaire. « J’apporte des arguments juridiques pour formuler les propositions, à partir de mon observation des contentieux et contraintes réglementaires récurrentes », explique-t-elle. Son expérience en la matière lui a valu d’être membre de la commission offshore du GT éolien, pour aider à caler le « permis enveloppe », objet d’un décret en décembre dernier.
« J’apporte ma pierre à l’édifice »
« Hélène Gelas est une brillante avocate, mais pas seulement. Elle s’intéresse à la progression de l’ensemble de la filière et y consacre beaucoup de temps », fait observer Pauline Le Bertre, déléguée générale de France Energie Eolienne. De fait, à son sens du collectif Hélène Gelas ajoute une remarquable disponibilité, dont peuvent témoigner aussi les journalistes, demandeurs pressés d’explications simples mais précises. « J’apporte ma pierre à l’édifice », résume sobrement l’intéressée. Son expertise s’appuie sur une déjà longue expérience acquise dans les EnR, depuis 2005 précisément, après une thèse de droit international. Une époque où les inconnues juridiques ne manquaient pas dans les EnR : « l’une de mes premières interventions a consisté à discuter avec les pouvoirs publics de la circulaire sur le solaire intégré au bâti » , se souvient-elle dans un sourire.
“Hélène Gelas est une brillante avocate, mais pas seulement. Elle s’intéresse à la progression de l’ensemble de la filière et y consacre beaucoup de temps.”
Pauline Le Bertre, déléguée générale de France Énergie Éolienne
Des temps quand même lointains : « depuis lors, les services de l’Etat, les juges également, se sont familiarisés avec ces objets particuliers que sont les projets d’énergies renouvelables ». Mais il reste encore à faire, comme en témoigne l’imbroglio réglementaire persistant sur l’Autorité environnementale. « J’aimerais ne plus travailler sur ce sujet cette année, mais j’ai des craintes… », anticipe-t-elle. Ses préférences et souhaits pour 2019 ? Mettre en œuvre concrètement le permis enveloppe pour le futur lauréat de l’appel d’offres éolien en mer de Dunkerque et aider à lever les obstacles à l’autoconsommation, notamment dans les collectivités. De nouvelles pierres à l’édifice…
J.-P. P.
Carole Delga – Le geste allié à la parole
Toutes les régions françaises sont engagées dans la transition énergétique, mais certaines, plus que d’autres. L’Occitanie, qui veut devenir à énergie positive en 2050, figure dans le peloton de tête. Sa présidente, Carole Delga n’y est pas pour rien : « La transition énergétique est une priorité, depuis le début du mandat. Elle influence désormais toutes nos décisions », affirme-t-elle. Élue en 2016, tête de liste socialiste, Carole Delga a depuis montré qu’elle joignait le geste à la parole. Des exemples innovants et structurants ? Dans les transports, le Conseil régional vient de décider de reverser aux voyageurs une partie des 400 000 € de pénalités que verse la SNCF du fait de trains trop souvent en retard, après une renégociation avec la Région. Compte tenu des autres aides, les voyageurs des TER bénéficient maintenant de trois mois gratuits. Une autre initiative ? Cet appel à projets régional pour les énergies renouvelables coopératives et citoyennes, où la région investit 1 € à chaque fois qu’un citoyen fait de même. Dernier signe que l’Occitanie ne fait pas du façadisme écolo, la création d’une Agence régionale de l’énergie chargée d’impulser et d’investir dans les projets ; elle est sans équivalent en France pour le moment.
« Une relation très forte à la nature”
Cette politique volontariste correspond aussi à l’engagement personnel de Carole Delga, qui n’hésite pas à confier qu’elle éprouve « une relation très forte à la nature. J’ai été élevée et je vis toujours à la campagne, à Martres-Tolosane en Haute-Garonne», précise- t-elle. Ne pas gaspiller l’eau, faire des économies sur l’éclairage électrique, cette femme issue d’un milieu modeste a vu sa famille pratiquer ces gestes au quotidien. Et considère plus que jamais nécessaire de réduire l’ impact humain sur l’environnement.
Quels seront ses chevaux de bataille en 2019 ? Ils sont nombreux mais la présidente retient en tout premier lieu le transport à l’hydrogène et l’éolien flottant. Ce dernier se trouve mal servi selon elle par la Programmation n pluriannuelle de l’énergie. Elle connaît le sujet sur le bout des doigts : « Nous souhaitons un appel d’offres de 750 MW en 2020, dans trois régions, et pas du tout une procédure en 2021, pour 250 MW et seulement en Bretagne cette année-là ».
“Carole Delga est la référence du politique engagé qui croit en la transition énergétique et joint les paroles aux actes, un vrai modèle pour le reste de nos élus.”
Guy Auger, président de Greensolver.
Carole Delga en a parlé au président de la République le 11 janvier dernier ; il a objecté sur le modèle économique incertain de la filière. Pas de chance, l’élue occitane est intarissable sur la possibilité de créer pour de bon une filière industrielle, et ne pas reproduire le fiasco subi dans le photovoltaïque. Fait notable et qui crédibilise là aussi les propos, la Région mobilise 250 M€ dans l’aménagement de Port-La-Nouvelle pour accueillir les futures éoliennes marines. Attention les autres régions françaises, l’Occitanie est en train de creuser l’écart…
J.-P. P.
Françoise Coutant Région Nouvelle-Aquitaine • Vice-présidente Climat et TE |
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Originaire de Charente, Françoise Coutant continue à enseigner à temps partiel les sciences de la vie et de la terre dans un lycée d’Angoulême. Elle s’est engagée en politique chez les Verts en 2005. En 2008, elle devient adjointe au maire d’Angoulême et travaille notamment à la mise en place de l’Agenda 21. En 2010, elle devient vice-présidente de la Région en charge des transports et des infrastructures, avant de changer de siège en 2015. Elle crée le Conseil permanent de la transition énergétique et du climat. |
Astria Fataki – L’indignée en action

Son indignation reste sa première source de motivation. Son indignation face « aux inégalités à l’échelle de l’humanité ». Ni plus, ni moins. « J’ai beaucoup de mal à comprendre qu’on puisse envoyer un homme sur la Lune, mais pas subvenir aux besoins des plus démunis », se révolte Astria Fataki, la présidente d’Energy Generation. À 28 ans, avec un Master en management public international, cette diplômée de Science Po Paris aurait pu travailler dans une institution onusienne. Elle l’imaginait jusqu’à un voyage en Inde durant ses études. Dans ce pays frappé par la misère, elle a découvert un projet d’électrification dans un village reculé à deux heures de route de Delhi. « J’ai trouvé fantastique de voir combien un simple kiosque solaire pouvait y transformer la vie des habitants. » Depuis, elle s’est pleinement engagée dans la transition énergétique. En Afrique, là où ses pas l’ont menée après de multiples voyages sur tous les continents.
En 2016, elle a fondé Energy Generation pour permettre à la jeunesse africaine de s’approprier la transition énergétique. Basée à Lomé, au Togo, cette structure forme à l’entreprenariat des porteurs de projets innovants : 14 candidats de 12 nationalités différentes l’ont été en deux ans. Et six d’entre eux – trois par promotion – ont été sélectionnés pour intégrer l’incubateur créé par Energy Generation. L’organisation revendique le soutien technique et financier, ainsi que du mécénat de compétences, de grands groupes français : Schneider Electric, EDF et Engie. Mais aussi, entre autres, l’aide de l’Union européenne et du gouvernement du Togo.
« Astria Fataki, qui maîtrise 5 langues dont le lingala d’Afrique centrale et le bambara d’Afrique de l’Ouest, a développé un vrai savoir-faire sur les questions d’accès à l’énergie »
Jean-Louis Bal, président du syndicat des énergies renouvelables
Et ce n’est qu’un début. Astria Fataki, dont l’indignation semble décupler l’énergie, travaille à la création d’un fonds d’amorçage avec Energy Generation. En parallèle, elle développe une activité de conseil. La jeune femme veut faciliter le développement de centrales d’énergies renouvelables de plus grande envergure, 30 à 100 MW. « Car la transition énergétique africaine ne se contentera pas de microprojets ».
T. B.
Morgane Barthod CEO • Meteo*Swift |
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Après un cursus à l’École Polytechnique, Morgane Barthod a participé à des projets autour du stockage d’énergie, à l’évaluation des ressources d’énergie solaire, de l’hydroélectricité et du dégivrement des pales des éoliennes. Sa thèse est dédiée à la première cartographie des ressources d’énergie éolienne, commandée par l’Agence française de l’énergie. Ce qui la conduit à créer en 2015 sa start-up Meteo*Swift, dont les algorithmes ont été multi-primés. En 2017, le MIT Technology Review la nomme parmi les dix meilleurs innovateurs français de moins de 35 ans. |
Kelli Mamadou CEO • E-Sims |
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Âgée de 37 ans, Kelli Mamadou a grandi entre les Antilles françaises, la France et l’Afrique. Doctorante de l’Université de Grenoble en 2010, elle développe un nouveau modèle générique de batteries (SoE) utilisé par le CEA-Liten pour améliorer la fiabilité des systèmes de gestion de batteries. En 2015, elle fonde E-Sims, société d’édition de logiciels de gestion d’électricité avec stockage qui travaille avec EDF et des producteurs indépendants. Sa start-up a remporté deux concours nationaux en 2015 et 2016 pour ses innovations dédiées aux zones insulaires. |