L’Algérie fixe le cadre juridique de sa transition énergétique

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Chems-eddine Hafiz, associé, LPA-CGR avocats

Alors que l’Algérie dispose d’un potentiel solaire extrêmement important, elle a longtemps privilégié l’exploitation de ses hydrocarbures. Le gouvernement cherche désormais à mieux exploiter ses ressources naturelles. Un appel d’offres solaire de 4 000 MW sera bientôt lancé. Plusieurs dispositifs viennent de voir le jour en prélude à la compétition. L’éclairage de Chems-eddine Hafiz, associé LPA-CGR avocats.

 Un objectif ambitieux

L’Algérie dispose d’un des gisements solaires les plus importants au monde. L’ensoleillement annuel y est de plus de 3 500 heures. Le plan quinquennal 2015-2019 actuellement en vigueur vise à intensifier la production nationale et à réduire la dépendance de l’économie algérienne aux hydrocarbures.

En 2015, 14 centrales électriques photovoltaïques d’une capacité installée de 268 MW ont été mises en service dans les Hauts Plateaux et le sud de l’Algérie. Sur la période 2016-2020, quatre centrales solaires thermiques avec stockage d’une puissance totale d’environ 1200 MW devraient entrer en exploitation.

En ce qui concerne la phase 2021-2030, il est prévu l’installation de 500 MW par an jusqu’en 2023, puis 600 MW par an jusqu’en 2030. À l’horizon 2020, le programme de développement des énergies a pour objectif de porter la part du solaire à 37% de la production nationale globale d’électricité.

Le programme national de développement des énergies adopté en 2011 et révisé en 2015 prévoit, à l’horizon 2030, la production de 22 GW d’électricité à partir de ressources renouvelables dont 13 575 MW issus du solaire photovoltaïque et 5 010 MW de l’éolien. Le reste de ces 22 GW sera produit en utilisant d’autres technologies (biomasse, cogénération et géothermie). La réalisation de ce programme ambitieux nécessite des investissements colossaux estimés à 120 milliards de dollars.

Sur le plan politique, et pour mieux affirmer la volonté du président Algérien, un ministère dédié aux énergies renouvelables et à l’environnement a été créé à l’occasion du dernier remaniement ministériel.

Mise en place d’outils de financement

Le Fonds national pour la maîtrise de l’énergie et pour les énergies renouvelables et de la cogénération, est un compte d’affectation spécial. Il contribue notamment au financement des actions et projets inscrits dans le cadre de la promotion des énergies renouvelables et de la cogénération et des actions et projets inscrits dans le programme pour la maîtrise de l’énergie, ainsi qu’à l’octroi de garanties pour les emprunts effectués auprès des banques ou aux établissements financiers.

Les sources de financement et les dépenses imputables sur le fonds ainsi que les modalités de son évolution sont encadrés par deux arrêts interministériels publiés au Journal officiel du 11 janvier 2017.

Le premier de ces arrêtés, prévoit aux termes de son article 2 que, le Fonds, est alimenté, en ce qui concerne les énergies renouvelables et la cogénération, essentiellement à hauteur de « 1% de la redevance pétrolière. » Pour ce qui est de la maîtrise de l’énergie, les recettes proviennent essentiellement des subventions de l’Etat, du produit des taxes sur la consommation nationale de l’énergie, du produit des taxes sur les appareils énergivores et enfin du produit des remboursements de prêts non rémunérés consentis dans le cadre de la maîtrise de l’énergie.

Les dotations sont destinées à financer plusieurs projets et actions dont ceux de production d’électricité à partir de sources d’énergies renouvelables, d’achats d’équipements et d’actions de formation. Il s’agit aussi de financer les actions telles que l’introduction des normes et des labels d’efficacité énergétique, la sensibilisation, la recherche et le développement dans le domaine de la maîtrise d’énergie, la gestion et le suivi des audits énergétiques. Mais aussi l’isolation thermique des bâtiments, l’introduction et la diffusion des lampes performantes, la diffusion de chauffe-eau solaires, la conversion des véhicules au GPL/C et au GN/C et l’acquisition et conservation des bus GN/C.

Le second arrêté interministériel porte sur les modalités de suivi et d’évaluation de ce Fonds. Il prévoit comment déterminer le montant de la compensation que percevra le distributeur disposant d’un contrat d’achat d’électricité renouvelable et/ou de cogénération au titre des surcoûts induits par rapport au prix moyen de l’électricité conventionnelle.

Enfin, ce texte fixe aussi les conditions d’octroi des avantages du Fonds concernant la catégorie des projets inscrits dans le cadre du programme des énergies renouvelables et de la cogénération.

Les conditions du prochain appel d’offres pour la production et la distribution de 4.000 MW d’électricité d’origine solaire

Dans le cadre de son Programme national de développement des énergies renouvelables, l’Algérie envisage la production de 4.000 MW d’électricité à partir des énergies renouvelables et a appelé les investisseurs nationaux et étrangers à s’intéresser davantage au marché des renouvelables.

L’appel d’offres national et international pour la production et la distribution de 4.000 MW de solaire devrait être lancé au cours de l’été 2017.

En tout état de cause, le décret qui définit également les procédures nécessaires à l’ancrage législatif et réglementaire pour la mise en place de ce projet a été diffusé dans le Journal Officiel au mois de mars dernier.

La réalisation des champs solaires et la distribution des 4 000 MW d’électricité seront attribuées aux soumissionnaires les moins disant sur le prix du KWh.

Le gouvernement algérien n’a donc pas retenu l’option de la fixation d’un prix du KWh garantit par l’Etat algérien client, basé sur une grille de « feed in prices » (prix garantis) de 2014. Ce mécanisme a été écarté afin de protéger le consommateur en lui offrant une énergie propre et durable sans augmentation du prix de l’électricité.

Aujourd’hui, le lancement prochain de cet appel d’offres focalise l’attention des investisseurs nationaux et étrangers, ces derniers gardant également un œil attentif sur l’évolution du cadre juridique relatif aux investissements étrangers et notamment sur la règle 51/49. Il est à rappeler que l’exercice en Algérie des activités de production de biens, de services et d’importation par les étrangers est subordonné à la constitution d’une société dont le capital est détenu, au moins, à 51% par un actionnariat algérien.

Cet appel d’offres comprend deux volets importants, énergétique et industriel.

Il est prévu de créer en partenariat des sociétés par actions pour assurer le financement et la mise en service des centrales solaires ainsi que la réalisation et la maintenance de ces usines. La partie industrielle du projet consiste en la création de plusieurs coentreprises spécialisées dans la fabrication de modules photovoltaïques, d’onduleurs et d’autres équipements.

La Compagnie de l’engineering de l’électricité et du gaz (CEEG), filiale du puissant groupe Sonelgaz, est allée présenter à Washington ce projet solaire photovoltaïque lors d’un forum international consacré au développement de l’investissement dans le secteur énergétique en Afrique.

Il a été présenté comme l’un des plus importants projets en Afrique, devant contribuer à la transition énergétique de l’ensemble du continent.

 

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