Les dix sujets qui vont vous occuper cette année

Print Friendly, PDF & Email

L’année 2016 n’a pas été avare de surprises, avec une mention spéciale pour le nouveau régime de soutien à la filière éolienne. Celle qui commence, marquée par l’élection présidentielle, sera certainement riche en rebondissements. Cela n’empêche pas de faire un petit tour des enjeux probables du millésime naissant.

Appels d’offres généralisés

Le premier est sans conteste la généralisation de la mise en concurrence des projets dans les énergies renouvelables dites matures, ie les secteurs solaire, biomasse et éolien terrestre, pour les installations de forte et moyenne puissances. Dans l’éolien terrestre, deux appels d’offres ont été annoncés par le ministère de l’Environnement en décembre, mais pas programmés pour l’instant. Le premier round photovoltaïque de 500 MW sera bouclé le 1er février.

Les joies du marché

Ces compétitions auront lieu dans le cadre du régime tout à fait inédit du complément de rémunération, destiné à accélérer la compétitivité de la production via la vente directe. Le mouvement suppose de recourir à de nouvelles compétences, celles des traders et des agrégateurs. Les incertitudes ? Les volumes proposés par les compétiteurs pourraient ne pas correspondre aux objectifs triennaux fixés par le gouvernement dans le cadre de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Les investisseurs et financeurs français pourraient en effet durcir leurs conditions et freiner les ambitions des développeurs.

Sur le segment éolien encore exempt d’appels d’offres, celui des parcs de six mâts au plus, les entreprises vont devoir apprendre à modéliser leurs projets avec un tarif de 72€/MWh, alors que les gros gisements de vent se font logiquement de plus en plus rares dans l’Hexagone. Quant aux agrégateurs, il reste à savoir si ce marché tout nouveau lui aussi sera trusté par les spécialistes et les utilities nord-européennes ou s’il laissera une place aux acteurs français encore émergents et nettement moins riches.

Intégration verticale ?

Au delà des agrégateurs, le nouveau terrain de jeu régulatoire pourrait favoriser un autre modèle émergent, celui de la PME intégrée, à la manière de Quadran avec Energies Libres et l’ex-Enel France, à la fois producteur et fournisseur d’électricité comme le sont les grands énergéticiens historiques.
2016 a été marquée par l’émergence de nombreux fournisseurs d’énergie alternatifs – souvent verts, souvent collaboratifs – ekWateur, Ilek ou Plüm Energie pour les particuliers, Energie de Provence (Hydroption), Energies Libres (Quadran) pour les professionnels. Et de grands groupes préparent de nouvelles offres pour cette année.

Repère : EnR : en route vers l’agrégation – décembre 2016

Concentration ou pas ?

Désormais ultra-dominant dans les appels d’offres, le critère du tarif devrait favoriser les entreprises les plus puissantes, sans doute au détriment de la diversité historique du paysage économique des EnR tricolores. Mais l’année 2017 va aussi permettre de tester l’attractivité du bonus inventé par l’administration pour contrebalancer ce mouvement en encourageant le financement décentralisé, citoyen et local. Le seuil des 40% de financement participatif est-il réaliste ? Les résultats du premier appel d’offres photovoltaïque fourniront des indications sur le succès de cette idée, neuve elle aussi.

Appétence confirmé pour le financement participatif

De toute façon le financement participatif de la transition énergétique va bon train. Les chiffres continuent de gonfler et les plateformes qui proposent aux citoyens d’aider à financer des projets ou des entreprises durables se multiplient, surfant sur l’appétence des citoyens et des porteurs de projets. Pour autant, la concurrence est rude – des plateformes ont déjà disparu – et le paysage devrait continuer de bouger en 2017.

Repère : Le financement participatif en plein essor – décembre 2016

cheque-cadeauCet article est en accès gratuit !
Si vous n’êtes pas abonné(e), découvrez nos offres et accédez à l’ensemble de notre contenu…

L’autoconsommation sort de la confidentialité

Pour l’instant, cette disposition a été bien perçue dans l’univers en expansion de l’autoconsommation : 28 projets avec financement participatif ont été retenus lors du premier appel d’offres clos en septembre 2016. L’autoconsommation est-elle même l’un des forts enjeux des douze mois qui viennent, et au-delà bien entendu. Désormais encouragée officiellement, intégrée dans le marketing de grands groupes comme EDF et objet d’innovations de nombreuses start-up, elle a pour la première fois l’occasion de dépasser le stade d’une diffusion confidentielle et d’accéder progressivement au grand public.

Repère : la France à l’heure de l’autoconsommation – septembre 2016

Smart building en vogue

Qui dit autoconsommation dit aussi smart building car la production et la consommation doivent nécessairement s’aligner. Le déploiement de compteurs intelligents pour l’électricité (Linky est déjà déployé à 2 millions d’exemplaires), pour le gaz (Gazpar) mais aussi pour l’eau permettra le développement de multitudes d’applications pour rendre la consommation d’énergie modulable et intelligente. La technologie du registre numérique sécurisé dite blockchain peut potentiellement révolutionner les modes de consommation – exemple de l’autoconsommation itinérante développée par SunChain – et les business models associés. La tendance est transverse et associe aussi bien les poids-lourds du bâtiment que ceux du numérique et les start-up de l’internet des objets.

Grandes manoeuvres dans le stockage 

Parallèlement, la recomposition des schémas de production et de consommation pose la question du stockage. L’enjeu est stratégique et les prises de position d’aujourd’hui seront cruciales demain : en témoignent les nombreux rachats – Total/Saft, Engie/Green Charge Networks –, les partenariats stratégiques – EDF/BYD, E.ON/Samsung – mais aussi la montée en puissance de game changers tels que Tesla, Sonnen ou Younicos.

Repère : Dossier stockage – Mars 2016

La mobilité électrique bouge, enfin ? 

La mobilité continue, elle aussi, sa mutation en 2017 avec une poursuite des investissements dans les domaines de la mobilité propre (véhicules électriques, à hydrogène, etc…), des transports intelligents et autonomes, du vehicule-to-grid mais aussi de la mobilité partagée (autopartage, covoiturage). Les constructeurs automobiles sont aux avant-postes avec des stratégies renouvelées, en témoigne l’exemple récent de l’allemand Volskwagen qui compte se tourner massivement vers les véhicules électriques. Le groupe Peugeot a sorti les griffes : sa nouvelle marque, Free2Move, regroupe désormais l’ensemble de ses offres de services connectés et de mobilités. Côté infrastructures de recharge, le territoire se maille peu à peu. En France, il est porté essentiellement par les collectivités mais aussi par des “opérateurs nationaux” : Sodetrel, Bolloré ou EDF. En Europe, quatre constructeurs automobiles – Volkswagen, BMW, Daimler et Ford – viennent de fonder une co-entreprise dont l’objectif est d’implanter un réseau de bornes de recharge ultra-rapide.

L’efficacité énergétique attire les investisseurs

L’évolution de la réglementation devrait aussi stimuler les travaux d’efficacité énergétique, dans le bâtiment et l’industrie. Depuis le 1er janvier, l’isolation thermique est devenue obligatoire lors d’une réhabilitation importante telle qu’un ravalement de façade ou une réfection de toiture. D’ici le 31 mars 2017, les frais de chauffage doivent être individualisés dans les immeubles collectifs lorsque la consommation dépasse 150 kWh/m². Dans le tertiaire, et même si le décret sur l’obligation des travaux d’isolation continue à se fait désirer, le contexte semble se faire enfin porteur pour les opérations de réhabilitation lourde, de manière à prévenir la dévalorisation définitive des actifs. De grands investisseurs affectent d’importants moyens dans ce secteur et notamment plusieurs fonds infrastructures : Infravia vient de miser sur un réseau de compteurs d’eau individualisés, Meridiam et la CNP commencent à investir leur véhicule de 455 M€, Pro BTP et Omnes Capital vont multiplier les deals avec les promoteurs immobiliers pour bâtir ou réhabiliter des immeubles tertiaires exemplaires. L’année 2017 sera également marquée par la préparation de la réglementation thermique 2018-2020 sur le neuf et sur la place réelle laissée aux équipements de production d’énergie, un enjeu important à terme pour l’industrie solaire.

Repère : Dossier RT 2020 : le grand soir du bâtiment durable ? – septembre 2016

Anne-Claire Poirier et Jean-Philippe Pié

Article précédentBCM Energy, jeune agrégateur lyonnais, s’empare de Planète Oui
Article suivantHiver 2017-2018 : RTE identifie au moins 2,5 GW d’effacement mobilisables