Avis d’expert : PME et ETI, les laissées pour compte de l’éco-innovation

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IMG_1771Grâce à de nombreuses initiatives (para)publiques ou privées, la coopération avance entre grands groupes et très petites entreprises dans le domaine de l’éco-innovation. Qu’il s’agisse d’innovation collaborative, de financement et d’entrée au capital, de co-développement, voire d’accompagnement à l’export, les pistes foisonnent et les champions nationaux jouent le jeu. Mais ces quelques arbres sont en train de cacher la forêt des grosses PME et ETI qui peuplent le territoire français. Pour elles, les éco-innovations représentent pourtant un véritable champ d’opportunités, analysent Etienne Grange, Etienne de Rocquigny, Eric Haber et Stéphanie Savel, associés de Synergies Vertes, catalyseur d’innovations et de coopérations écologiques.

L’éco-innovation, un atout pour les PME-ETI

Très bien implantées localement, les PME et ETI sont en mesure de nouer avec leur environnement des relations pérennes, sources d’innovation. Leur fonctionnement s’adapte entièrement aux principes de l’économie circulaire (les déchets des uns deviennent les matières premières des autres) et de l’écologie industrielle (on mutualise les ressources au sein d’un territoire ou d’un secteur d’activité). Enfin, leur parfaite connaissance du tissu économique local favorise les partenariats nécessaires. Garantissant la création d’emplois qui ne partiront pas dans un pays à bas coûts.

Industrielles pour la plupart, les PME et ETI sont particulièrement exposées à la raréfaction des ressources naturelles et au renchérissement programmé du coût des énergies fossiles. Les éco-innovations peuvent générer des gains significatifs tout en améliorant leur compétitivité.

Intégrer des éco-innovations, c’est une façon de développer leur marché. C’est aussi une piste prometteuse de différentiation concurrentielle, d’innovation de rupture, susceptible d’ouvrir de nouveaux marchés et d’insuffler une nouvelle dynamique dans leur histoire d’entreprise.

L’éco-innovation représente un outil managérial formidable. Ambitieuse, elle fédère les collaborateurs sur le long terme autour d’un projet d’entreprise porteur de sens. Une valeur susceptible de séduire les jeunes talents d’aujourd’hui.

Enfin, la structure de l’actionnariat des PME et ETI est particulièrement propice à l’adoption de nouveaux modes de production et de fonctionnement. 40% des ETI nationales sont en effet détenues à 100% par une ou des personnes physiques connues qui dirigent effectivement l’entreprise.

L’intégration efficace de process plus respectueux de l’environnement suppose de véritables convictions, portées au plus haut niveau, susceptibles de faire tomber les scepticismes les plus tenaces, toujours nombreux. L’environnement s’accommode mal d’actionnaires pressés de générer un fort taux de rentabilité. Il préfère les actionnariats familiaux capables d’investir sur le moyen terme, pour qui pérennisation de l’investissement et création d’emplois locaux ne sont pas de simples déclarations politiquement correctes.

Les jeunes entreprises éco-innovantes françaises, un des viviers les plus riches du monde

De l’autre côté du spectre, de très nombreuses start-ups ou jeunes entreprises éco-innovantes (éco-JEI) inventent le monde de demain. Dans la plupart des domaines de l’innovation environnementale, la France n’a pas à pâlir face à la concurrence internationale, tant elle foisonne de découvertes et de « rage » d’entreprendre.

Qu’il s’agisse d’éco-mobilité, d’efficacité énergétique, de gestion de déchets, de gestion de l’eau… les entrepreneurs français ne manquent pas d’idées : l’observatoire GreenUnivers recense plus de 450 éco-JEI particulièrement dynamiques, créées depuis 2007.

Les PME et ETI apparaissent comme les interlocuteurs privilégiés des jeunes pousses, ces  entreprises en devenir, portées par des hommes et des femmes craignant d’être « dépossédés  de leur bébé »… D’un côté, la taille humaine des PME et ETI inspire une forte proximité entre dirigeants et équipes de terrain. De l’autre, leur belle assise industrielle et financière est gage de partenariats sérieux et prometteurs.

Une rencontre difficile

Et pourtant, aujourd’hui, la rencontre entre start-up éco-innovantes et PME/ETI reste une étape difficile à franchir.

Dans les PME et ETI, on a peu de temps, de ressources, d’accès et de connaissance du monde bouillonnant des éco-innovations. Le plus souvent, il n’existe pas d’équipes étoffées dédiées à l’innovation et à la veille technologique. Et puis, les freins psychologiques demeurent vifs : crainte d’un manque de pérennité, de surface financière, de capacité industrielle, de compatibilité avec les procédés et produits maison, de fiabilité contractuelle….

Du côté des jeunes entreprises innovantes, c’est un peu la même histoire. Peu de temps, de ressources, accès difficile au monde éclaté des PME et ETI, peur de se faire « cannibaliser » par les grandes… Et surtout, méconnaissance des bonnes pratiques de collaboration gagnant-gagnant. De fait, il n’existe pas encore de cadre structurant facilitant cette rencontre. Aujourd’hui les uns et les autres restent isolés, souffrant d’un manque de visibilité et de lisibilité du marché.

Mais ces acteurs s’ignorent pour de mauvaises raisons. Pourtant, ils sont faits pour coopérer, innover et se développer ensemble.

Alors, voilà une belle occasion pour ne plus rougir de la traditionnelle comparaison avec le « Mittelstand » d’outre-Rhin, clé reconnue de la croissance et de la création d’emplois… Faisons jouer les synergies vertes, gages de formidables opportunités la transition écologique.

 

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