Solaire : décryptage du projet d’arrêté sur le bonus pour les panneaux européens

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Le gouvernement prépare un arrêté qui doit permettre d’encourager le recours à des panneaux solaires photovoltaïques européens. Un bonus économique mais pas juridique. Première analyse avec Arnaud Gossement et Sarah Nataf, avocats du Cabinet Gossement Enckell.

Un dispositif tarifaire complexe

On se souvient que l’un des motifs principaux pour lesquels le gouvernement avait souhaité remettre en cause le dispositif tarifaire applicable à l’achat d’énergie solaire tient à ce que ce dernier aurait avantagé l’industrie étrangère et notamment chinoise. Cette remise en cause s’est traduite par des baisses successives du tarif d’achat au cours de l’année 2010 puis par une suspension de trois mois – un moratoire – de l’obligation d’achat. La structure du dispositif a par la suite été profondément remaniée, avec la mise en place d’appel d’offres en mars 2011 pour les installations de plus de 100 kWc. Au total, ce sont aujourd’hui de très nombreux textes qui définissent les conditions d’octroi du tarif d’achat, contribuant à la complexité juridique du système. Complexité à laquelle contribue ce nouveau projet d’arrêté.

Ce dernier, « relatif aux conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil » vient compléter le dispositif tarifaire de l’arrêté du 4 mars 2011, actuellement en vigueur. Son écriture procède de l’annonce réalisé par le Présidence de la République au moment du sauvetage de la société Photowatt. Il prévoit une majoration de 10% des tarifs d’achat de l’électricité photovoltaïque, pour les installations utilisant des panneaux photovoltaïques européens. Le projet de texte doit être, sous peu, communiqué pour avis au Conseil supérieur de l’énergie.

Une majoration de 10%

Cette majoration du tarif d’achat ne peut être sollicitée que par les exploitants d’installations photovoltaïques d’origine européenne, et plus précisément si au moins deux des trois conditions suivantes sont vérifiées :

– toutes les étapes du processus de transformation du lingot de silicium aux plaquettes de silicium des modules photovoltaïques ont été réalisées sur un site de production installé au sein de l’Espace Economique Européen (ci-après « EEE ») ;

– toutes les étapes du processus de transformation des plaquettes de silicium aux cellules des modules photovoltaïques ont été réalisées sur un site de production installé au sein de l’EEE;

– les opérations de soudage des cellules, d’assemblage ou de lamination des cellules et de tests électriques des modules photovoltaïques ont été réalisées sur un site de production installé au sein de l’EEE.

Les installations éligibles à la majoration tarifaires sont celles pour lesquelles une demande complète de raccordement, telle que définie par l’arrêté du 4 mars 2011, est déposée à compter du 1er janvier 2013. En l’état actuel du projet, il ne semble donc pas envisageable, pour les installations en cours de raccordement ou déjà mises en service, de prétendre au bénéfice de cette majoration.

La procédure à respecter

Le producteur doit soumettre sa demande de bénéfice du bonus au gestionnaire de réseau public, concomitamment à sa demande de raccordement. Outre certaines informations relatives à son identité ou la localisation de l’installation, il doit préciser dans quelle mesure son installation répond aux conditions d’éligibilité. Ces conditions sont bien entendu vérifiées avant la date de mise en service de l’installation.

En ce sens, soulignons que le projet d’arrêté prévoit que le producteur sera tenu de communiquer, à l’acheteur, un certificat permettant d’attester le respect des conditions indiquées dans sa demande de majoration tarifaire. Ce certificat doit être délivré par un organisme certificateur bénéficiant d’une accréditation, et ayant opéré un audit sur site dont les conditions sont strictement encadrées par le projet d’arrêté. Les conditions de réalisation de cet audit, ainsi que les conclusions qui en sont issues, sont précisées au sein du certificat, dans les conditions fixées par l’annexe 2 du projet d’arrêté. Outre la délivrance dudit certificat, le producteur sera également tenu d’adresser à l’acheteur, avant la date de mise en service de son installation, une attestation sur l’honneur de l’installateur stipulant que les modules certifiés équipent en totalité l’installation photovoltaïque.

Si ce projet d’arrêté présente l’indéniable intérêt de promouvoir les panneaux photovoltaïques français et européens, il n’en reste pas moins qu’il complexifie un dispositif tarifaire déjà considéré par les professionnels de la filière comme peu transparent. Outre la circonstance qu’il s’appliquera, de manière surabondante, au dispositif tarifaire du 4 mars 2011, il met à la charge des producteurs de nouvelles obligations, notamment pour démontrer leur éligibilité. Les risques de contentieux pourraient alors en être accrus.

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