Energie solaire : une procédure d’appel d’offres perfectible

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Depuis la sortie du moratoire en mars dernier, le Gouvernement a fait savoir qu’il entendait soumettre tous les projets d’installations solaires de plus de 100 kWc à une procédure d’appel d’offres. Le 3 juin 2011, il a donc dévoilé les projets de conditions des appels d’offres en indiquant cependant que les conditions techniques ne seront définitivement arrêtées qu’à l’issue d’une consultation. Ces projets, s’ils apportent des précisions sur les nouvelles contraintes qui pèsent sur les producteurs d’énergie solaire, soulèvent toutefois des interrogations. Le point avec Audrey Bourlon, avocate au cabinet Huglo-Lepage & Associés.

Des exigences accrues qui pèsent sur le porteur de projet

On remarque, dans l’exposé des conditions d’admissibilité, que le Gouvernement souhaite avant tout que les projets soient développés sur d’anciens sites industriels, en indiquant de manière particulièrement floue que le « terrain ne doit pas présenter d’enjeux écologiques particuliers ». Il est également intéressant de noter que les porteurs de projets devront respecter le principe de continuité de l’urbanisation contenu dans les lois Littoral et Montagne. Le Gouvernement semble donc envisager d’étendre aux installations solaires la jurisprudence rendue en matière d’éoliennes (cf. CE 16 juin 2010, Leloustre, n°311840 ; CAA Nantes 28 janvier 2011, Société Néo Plouvien, n°08NT01037). Le lieu d’implantation des installations solaires devra donc faire l’objet d’une analyse attentive de la part des producteurs.

En outre, le porteur de projet devra, en sus de l’ensemble des procédures auxquelles il est soumis par la réglementation en vigueur, entreprendre des démarches complémentaires. A ce titre, le porteur de projet devra réaliser un dossier d’évaluation préliminaire des impacts environnementaux et d’évaluation des risques industriels, ou encore un bilan carbone simplifié.

Si le critère essentiel de l’offre demeure le prix, qui sera indiqué librement par le candidat, une partie significative de la notation de l’offre dépendra de la contribution à la recherche et au développement.

A ces contraintes déjà importantes, s’ajoutent les obligations de remise en état et de recyclage qui pèsent désormais sur le porteur de projet.

La démarche du Gouvernement, qui consiste à développer une filière photovoltaïque française respectueuse de l’environnement, est certes louable. Toutefois, ces conditions risquent de favoriser les producteurs dont les moyens leur permettent d’assumer les coûts supplémentaires induits par ces nouvelles procédures sans aucune garantie d’être sélectionné in fine.

Les problèmes soulevés par la mise en œuvre de ces conditions

Plusieurs dispositions du projet de conditions de l’appel d’offres sont critiquables tant du point de vue de leur mise en œuvre pratique que de leur fondement légal ou réglementaire.

Il convient de citer, par exemple, l’exigence de l’obtention d’une autorisation d’urbanisme au moment de la candidature. Cette exigence peut constituer un obstacle pour certains porteurs de projet. En effet, rappelons que pour les centrales solaires au sol d’une puissance supérieure à 250 kWc, les producteurs doivent réaliser une étude d’impact et une enquête publique préalablement au dépôt de la demande de permis de construire.

Une autre disposition exclut, explicitement cette fois-ci, un grand nombre de projets à la candidature à l’appel d’offres. En effet, il est prévu que seules les « installations nouvelles » qui n’ont fait l’objet d’aucun travaux de construction peuvent concourir aux appels d’offres. Quid des installations pour lesquelles les travaux de construction ont déjà été commencés mais qui ont fait l’objet d’une suspension en application du décret dit « moratoire » du 9 décembre 2010 ? Rappelons que ces projets, dont certains étaient parvenus à des stades très avancés, doivent faire l’objet d’une nouvelle demande de raccordement à l’issue du moratoire. Dès lors qu’il ne s’agit pas d’installations nouvelles, il est exclu pour le producteur de candidater à un appel d’offres, l’obligeant ainsi à renoncer à un projet pour lequel il a engagé des frais.

Alors que le Gouvernement envisage seulement une évolution des conditions techniques de l’appel d’offres, il eut été également souhaitable qu’une réflexion soit engagée sur d’autres conditions afin de lever les ambigüités et incohérences existantes.

 

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