Conférence sur le climat : la Chine ne veut pas d’impact sur sa croissance

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Par Olivier Sasportas, correspondant à Pékin

Sans surprise, la conférence sur le climat qui s’est tenue à Tianjin, en Chine, du 4 au 9 octobre, s’est achevée sans le moindre semblant de consensus capable d’aboutir à la signature d’un accord, soit à Cancun en novembre,ou au plus tard en Afrique du Sud l’année prochaine.

La prolongation du  protocole de Kyoto dans des termes qui pourront assurer une lutte efficace contre le réchauffement climatique apparaît de plus en plus hypothétique.

Hôte pour la première fois d’une réunion de travail sur le climat sous l’égide des Nations Unies, la Chine a rapidement renvoyé la balle dans le camp des pays  riches pour mieux les accuser de ne pas jouer le jeu.

Su Wei et Xie Zhenhua, les deux principaux négociateurs chinois, sont tour à tour montés au créneau afin de défendre le respect des traités qui reconnaissent la dette morale des pays du Nord envers les pays du Sud et légitiment leur demande de compensations financière ou technologique. Très explicite, Xie Zhenhua a reconnu que le pic d’émissions de GES de l’économie  chinoise dépendait avant tout du montant de l’aide financière et de la nature des technologies transférées. Il a même estimé que le pic d’émissions chinoises ne serait pas atteint avant que le PIB du pays par habitant n’égale les 40 000$ ( il est aujourd’hui à 3 000$). En clair, aucune réduction d’émissions de GES ne devra impacter la croissance chinoise tant que le niveau de vie de la population de l’Empire du milieu n’égalera celui d’un Français ou d’un américain.

L’esprit de Kyoto est loin !

Face à la position chinoise – partagée par une majorité des pays du Sud au nom du respect de la souveraineté des plus faibles et de l’aspiration à une justice « historique » – la position des Etats-Unis a symbolisé à l’extrême l’approche d’Occidentaux davantage intéressés par un engagement rationnel, basé sur des objectifs de réduction d’émissions clairs, quantifiables et vérifiables pour toutes les parties.

Autant dire que l’esprit de Kyoto, inspiré par une neutralité onusienne conciliante et des enjeux économiques encore incertains lors de son élaboration, paraissait à des années lumières de Tianjin. En 1997, les Etats-unis avaient déjà refusé de signer le traité contraignant et la  Chine n’était que la 7ème puissance économique du monde. En 2010, les deux pays qui sont les plus grands pollueurs de la planète en sont également les deux premières économies et les enjeux sont clairs pour tous : le leadership.

Alors que la bataille commerciale entre Washington et Pékin, cristallisée autour de la valorisation de la monnaie chinoise, ouvre chaque jour de nouveaux fronts, il apparaît improbable qu’un accord cédant le moindre abandon de puissance puisse voir le jour.

Même l’Europe, habituellement auréolée d’un penchant pour le compromis ne semble plus prête à jouer les pompiers et a admis au terme de la conférence, à la fois la lenteur du processus et l’importance des obstacles qui restent à franchir.

Un bras de fer qui rend tout accord difficile

Ironie de l’histoire, le consensus n’a peut-être jamais été aussi fort pour reconnaître que tout doit être tenté afin de combattre, sinon la dégradation du climat, du moins l’exploitation déraisonnable de la planète.

Seulement, si les grands émergents – la Chine et l’Inde en tête– ont, malgré leur rhétorique, conscience que leur spectaculaire développement ne sera durable qu’en tenant compte de l’environnement et via l’application de technologies propres, les pays développés savent, eux, que la sauvegarde d’un semblant de suprématie dépend de leur capacité à maîtriser le nouveau paradigme économique.

En somme, si un accord qui répartirait équitablement droits et devoirs vis à vis de la planète ne voit pas le jour pour prolonger le protocole Kyoto, il y a de grandes chances que le dialogue entre nations se poursuive à coups d’obtentions de brevets et de conquêtes de marchés.

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