L’éolien à la veille d’un boom, le solaire toujours à la peine

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photo Nico jpegLes fabricants d’éoliennes seront portés par le boom du marché en 2010, alors que beaucoup de producteurs de panneaux solaires continueront à souffrir : la moitié d’entre eux pourraient disparaître. C’est l’analyse de Nicolas Rochon, codirecteur de la gestion de Financière de Champlain, responsable du pôle environnement. Il fait le point sur les marchés des énergies nouvelles à l’occasion des cinq ans du Fonds commun de placement “Performance Environnement” de Champlain, l’un des premiers fonds thématiques environnement qui a réalisé une performance de 40,67% depuis sa création en 2004 et de 20,84% depuis le début de l’année.

GreenUnivers : quelle est aujourd’hui la part des énergies nouvelles dans votre FCP Performance Environnement ?

Elles représentent aujourd’hui 50% du portefeuille : nous avons surpondéré en raison des opportunités que nous voyons dans le secteur par rapport à des secteurs plus défensifs comme l’eau ou les déchets. Nous sortons d’une période très difficile : la crise financière a particulièrement pesé sur ce secteur qui a besoin de fonds importants. Beaucoup de projets ont été gelés ou abandonnés dans les derniers mois. Mais la donne change  et aujourd’hui, nous avons une conjonction de faisceaux très positifs. Le premier, c’est l’amélioration très nette du système de crédit, ce qui est capital pour un secteur qui fonctionne à 80% avec de la dette. Les financements sont plus faciles à obtenir car les tarifs d’achat, notamment, offrent une garantie aux banquiers. Le second, c’est la réglementation et les plans de relance dans le monde entier qui soutiennent très activement les énergies nouvelles. Avec l’approche du sommet de Copenhague, en décembre prochain, les gouvernements commencent à dévoiler leurs objectifs : l’Inde veut passer à 20 GW de solaire d’ici à 2020, contre 150 MW installés cette année, le Japon vient de mettre en place un tarif d’achat pour le solaire qui, conjugué à un prix des énergies fossiles élevé dans le pays, devrait permettre d’atteindre la parité réseau dès 2011 ! La Chine compte multiplier ses capacités éoliennes par trois d’ici à 2020 : elle a déjà relevé son objectif à 100 GW, contre 30 GW annoncés initialement, et on s’attend à ce qu’elle le relève encore à 150 GW. L’horizon se dégage pour le long terme : les marchés vont s’emballer. On devrait le voir dans les comptes des entreprises au second semestre 2010, et probablement en Bourse dès le premier semestre.

GU : pourtant, certains secteurs souffrent, comme le solaire ?

Le solaire a un bel avenir à long terme mais il est effectivement dans une passe difficile et nous avons d’ailleurs considérablement allégé nos positions. En 2009, les capacités de production, au niveau mondial, devraient atteindre 7,5 GW, pour une demande évaluée entre 4 et 5 GW ! Face à cette surproduction, les prix vont encore chuter de 25 à 30% l’année prochaine après une chute de l’ordre de 35% en 2009. La moitié des fabricants de panneaux solaires pourraient disparaître. Deux types d’entreprises s’en sortiront : les producteurs low cost, comme les Chinois Trina Solar, Yingli ou Suntech, et les leaders technologiques, comme First Solar et SunPower. Les producteurs chinois accaparent déjà 50% du marché et ils pourraient grimper à 70% en 2011. Les intermédiaires, comme l’allemand Q-Cells, risquent de souffrir. La consolidation du secteur a commencé et elle va s’accélérer.

GU : mais vous restez confiant pour le solaire à plus longue échéance ?

Oui, une fois la purge faite ! Grâce aux tarifs d’achat et à la chute des prix des panneaux, la parité réseau sera atteinte plus rapidement. Donc, les perspectives redeviennent favorables à moyen terme : pour l’instant, on continue à alléger, mais il faudra revenir sur ce secteur, mais pas avant 2011 vraisemblablement.

GU : et l’éolien ?

C’est « le » marché sur lequel nous misons le plus. Sur les 50% d’entreprises des énergies renouvelables de notre fonds, près de 30% sont dans l’éolien, contre 12% dans le solaire et 10% dans la biomasse. Dans le secteur, on a atteint la maturité technologique, ce qui n’est pas le cas dans le solaire. Avec la géothermie, c’est la solution la moins chère parmi les énergies nouvelles. Ces derniers mois, les grands producteurs, comme Iberdrola, ont réduit leurs projets et leurs investissements. Les fabricants de turbines connaissent donc une année difficile et ils ne réaliseront sûrement pas leurs objectifs. Mais l’éolien se taille la part du lion dans les plans de relance des gouvernements, la réglementation est favorable, les conditions d’accès au crédit s’améliorent, donc les projets redémarrent. Et en 2010-2011, on devrait avoir un rattrapage très important avec une croissance d’au moins 20% par an et pour plusieyrs années, avec le renfort de l’offshore à partir de 2012. Et là, il n’y a pas de guerre des prix : on a quelques gros acteurs bien implantés, comme Vestas, Gamesa, General Electric ou Siemens. La situation est claire et ces entreprises devraient en profiter pleinement.

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