“Les Etats vont stimuler les marchés des cleantech”: Richard Yougman, DG du Cleantech Group

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youngmanrichardphotoLes gouvernements vont prendre le relais des investisseurs privés et stimuler les cleantech dans les prochains mois, explique Richard Youngman, managing director du Cleantech group en Europe (*). Mais ils doivent trouver un  équilibre entre les dépenses urgentes pour endiguer la crise et les actions en faveur de l’environnement, dont les effets seront visibles à plus long terme.

GreenUnivers : comment voyez-vous les prochains moins pour les cleantech ?

2009 sera la première année de baisse des investissements du capital-risque après six années consécutives de hausse, selon nos prévisions. En 2008, les montants investis dans le monde ont augmenté de 38% par rapport à 2007 pour atteindre environ 8 milliards de dollars. Mais ils ont chuté au dernier trimestre. Et la tendance va continuer : nous anticipons 7 milliards de dollars d’investissements pour 2009. Certains secteurs seront plus exposés, comme le solaire à couche mince, qui a attiré des sommes considérables l’année dernière. D’autres s’en sortiront mieux : le stockage de l’énergie, les bâtiments verts, la gestion de l’eau…

GU : qu’est-ce qui peut tirer le marché ?

Dans le contexte de crise économique profonde et de resserrement du crédit que nous connaissons, la balle est clairement dans le camp des pouvoirs publics. Les investissements décidés par les gouvernements en faveur de l’environnement peuvent constituer un formidable aiguillon. On le voit bien aux Etats-Unis avec ce que l’on appelle le « Green New Deal » : Barack Obama a annoncé des mesures, notamment pour développer les énergies renouvelables, moderniser le réseau électrique ou améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments. C’est un formidable stimulant pour les investisseurs et les entreprises. Reste à connaître les montants exacts investis et le rythme auquel tout cela va se déployer. Et puis, en fin d’année, il y aura aussi le sommet de Copenhague, où va se décider l’après protocole de Kyoto : ce sera aussi un rendez-vous déterminant pour les cleantech.

GU : mais l’ampleur de la crise ne va-elle pas conduire les gouvernements à revoir leurs priorités ?

Ils sont effectivement face à un dilemme. L’ampleur de la crise les oblige à adopter des mesures d’urgence, en faveur du logement ou pour étendre la couverture chômage ou la couverture santé. Les investissements en faveur de l’environnement paraissent moins urgents, car ils ne vont pas avoir d’effets sur la croissance ou l’emploi à très court terme. Mais si les Etats ne préparent pas le long terme, ils vont prendre du retard et mettre en péril leur croissance pour les prochaines années. Il y a un équilibre à trouver ! Les échéances électorales vont sans doute jouer un rôle important : les gouvernements confrontés à des élections proches auront sans doute plus de mal que les autres à communiquer sur des objectifs plus lointains. C’est un peu pareil pour les entreprises : elles ont besoin d’améliorer leur efficacité énergétique, de réduire leur consommation en ressources naturelles comme l’eau… Cela les pousse à investir dans les écotechnologies. Mais avec la crise et la chute de leur valorisation, elles doivent aussi rassurer les marchés, ce qui peut les amener à différer cette stratégie pour privilégier d’autres actions de plus court terme.

GU : quels peuvent être les autres leviers ?

L’échelon local est aussi très important. Beaucoup de grandes villes dans le monde cherchent à devenir leader dans les cleantech, comme la Silicon Valley l’est devenue dans les technologies de l’information. En Europe, les villes scandinaves, et notamment Stockholm, sont en pointe. Londres est aussi active, avec des actions fortes dans les transports propres et les énergies renouvelables. Paris veut aussi se positionner (*). On voit bien qu’il y a une sorte de compétition entre elles. Mais les cleantech couvrent des champs très variés, de la gestion de l’eau à l’énergie : il peut y avoir plusieurs leaders sur différentes technologies

GU : quels sont les atouts de la France ?

Elle a intérêt à capitaliser sur les secteurs industriels dans lesquels elle est déjà très présente, comme la gestion de l’eau, les déchets, l’énergie… Elle a de grands groupes très offensifs à l’international, comme EDF, Alstom ou Veolia Environnement. En revanche, elle est moins bien positionnée dans les énergies renouvelables, où l’Allemagne a pris un leadership notamment dans le solaire.

(*) Richard Yougman était à Paris à l’occasion de la présentation d’Innov’Eco, conférences trimestrielles lancées par Paris Développement pour réunir les acteurs des éco-innovations en Ile-de-France, qui démarrent le 5 mars, et dont GreenUnivers est le partenaire média.

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